Accès
alternatifs : les expérimentations Wi-Fi et satellite se multiplient
Le
couplage des technologies satellite et Wi-Fi, comme alternative à laccès
ADSL, est une solution de plus en plus répandue. Mais son coût la
rend difficilement reproductible à petite échelle. Retour sur les
expérimentations de France Télécom et de la commune du Montet.
(31/08/2004)
Les zones résidentielles, couvertes partiellement ou non par l'ADSL, se tournent de plus en plus vers des solutions couplant Wi-Fi et satellite bi-directionnel pour accéder à l'Internet haut débit. Il est vrai que cette technologie est séduisante car elle permet la desserte de petits groupes d'utilisateurs sur un territoire non équipé en infrastructures filaires. Ici, tout transite par le satellite qui fournit la liaison haut débit partagée entre les utilisateurs situés à proximité des bornes Wi-Fi qui servent de relais.
Fort de ce constat, France Télécom s'est emparé de cette solution afin de remplir ses engagements dans le cadre de son programme "le Haut Débit pour tous". L'opérateur historique a ainsi lancé une série d'expérimentations qu'il a entièrement financées, sur neuf sites (La Cavalerie, Méaudre, Neulise, Moustier Ste-Marie, Vernou-en-Sologne, Saint-Mamet, Estables, Romagne et Champagné-St-Hilaire), afin de tester cette technologie et d'en "finaliser le domaine d'emploi". Le résultat est une offre baptisée "PackSurf Wi-Fi", qui sortira en octobre 2004. En attendant, France Télécom répond aux appels d'offres des collectivités par des solutions sur-mesure.
Le Conseil général de l'Allier et la commune du Montet, 500 habitants, n'ont pas, pour leur part, attendu l'opérateur français pour disposer du haut débit. Cette initiative, lancée en 2003, a été portée par le Conseil général en partenariat avec la commune. Celui-ci a monté un projet conforme au protocole de l'ART, pris en charge le coût de l'infrastructure (20.000 euros) à 50 %, et fait financer le reste à 25 % par la FEDER (Fonds européen de développement régional) et 25 % par la FNADT (Fonds national d'aménagement et de développement du territoire). Enfin, c'est la société Equal qui a fourni la connexion à haut débit, tandis que l'installation a été réalisée par la société Ineo Infracom.
Le premier objectif de ce chef-lieu de canton, le plus petit de France, était de valider la faisabilité technique de la formule. Verdict de Patrice Lamy, chef de projet à l'aménagement numérique du territoire au niveau du département : "Cela fonctionne bien, mises à part quelques micro-coupures." Le débit atteint 1024 kb/s en montant, et 128 kb/s en descendant.
Le deuxième objectif était de mesurer la reproductibilité du modèle. Sur ce point, Patrice Lamy exprime clairement ses réserves. "On ne peut pas reproduire cette expérimentation. Premièrement en raison de son coût : pour monter une antenne, l'investissement est de 15.000 à 20.000 euros. Deuxièmement, pour des raisons géographiques : il suffit d'être derrière un mur ou un rideau boisé pour être non éligible. Enfin, le fait que le débit soit mutualisé entraîne des risques de monopolisation de la bande passante par quelques utilisateurs non respectueux de leurs voisins." Et selon Patrice Lamy, le constat de non reproductibilité est le même dans toutes les communes qui ont testé la technologie satellite, même si elles ne veulent pas l'avouer.
C'est pourquoi, à la fin de son contrat qui arrive a échéance à la fin du mois d'octobre 2004, Le Montet a décidé d'opter pour l'ADSL de France Télécom. Alors que 10 abonnés étaient concernés par l'expérimentation satellite (leur nombre avait été volontairement limité), 10 % de la population s'est déjà raccordée à l'ADSL pour le même prix, à savoir 30 euros par mois.
Le bilan de France Télécom est sensiblement différent. Alors qu'il équipait une trentaine d'utilisateurs par commune en moyenne, dont 60 % de particuliers et 40 % d'entreprises, l'opérateur a mieux géré la problématique de partage de la bande passante car il a pu réaliser les investissements nécessaires. "Pour la gestion des heavy users, qui utilisent le peer to peer, il a fallu mettre en place des mécanismes de priorisation des flux afin d'assurer l'équité au niveau du village", explique Jean-Pierre Savi, responsable du pôle marketing produit pour les collectivités locales chez France Télécom.
Si, à la fin de la période d'expérimentation, conclue pour un an renouvelable six mois, l'ADSL n'est toujours pas disponible dans la commune, France Télécom maintiendra son service en réexaminant les conditions financières. A l'heure actuelle, quand l'opérateur répond à un appel d'offres, l'investissement pour la collectivité locale est compris entre 15.000 et 40.000 euros.
Il semble toutefois que le couplage satellite Wi-Fi ne soit
pas la panacée. "Nous travaillons aussi sur le Wimax, qui offre plus
de couverture et un meilleur débit que le Wi-Fi", déclare Jean-Pierre
Savi. A grande échelle, France Télécom envisage par ailleurs
de devenir multi-technologies. Même son de cloche au conseil général
de l'Allier qui doit annoncer en septembre le nom du délégataire
retenu pour aménager le département. "Il sera multi-technologies",
affirme Patrice Lamy.
Accès
alternatifs : la Vallée dAspe expérimente le CPL
Les
courants porteurs en ligne permettent de se connecter à lInternet
par la prise électrique. La Vallée dAspe, dans les Pyrénées,
fait partie des utilisateurs de la première heure. Mais cette technologie
expérimentale, challenger de lADSL, a un devenir incertain. (02/09/2004)
Déjà commercialisée en Allemagne, en Espagne et aux Etats-Unis, la technologie des courants porteurs en ligne (CPL) fait l'objet de tests depuis plusieurs années en France. Des expérimentations ont eu lieu à Courbevoie, à Geisswasser en Alsace, dans le Pays Chartrain, ou encore à la Haye du Puits dans la Manche. Deux petits villages situés dans la Haute Vallée d'Aspe, tout près de l'Espagne dans les Pyrénées-Atlantiques, l'ont également mise en uvre, en l'associant au satellite et au Wi-Fi.
Il est vrai que cette technologie offre quelques avantages, le principal étant de permettre la diffusion d'offres "quadruple play" par le biais de la prise électrique : énergie, Internet, téléphone et télévision. Par ailleurs, le CPL est exploitable à la fois à l'échelle des réseaux domestiques (indoor) et des réseaux métropolitains (outdoor). Dans le premier cas, cette technologie d'accès Internet concurrence le Wi-Fi ; dans le deuxième, elle concurrence l'ADSL.
Enfin, appliqué à la boucle locale, le CPL permet, en pratique, des débits symétriques partagés de 25 Mb/s, pour une "grappe" de 100 à 200 foyers environ. Son déploiement est rapide, puisque seuls les transformateurs basse tension (équivalent des répartiteurs pour l'ADSL) doivent être équipés, pour un coût de quelques milliers d'euros l'unité.
Le projet CPL de la Haute Vallée d'Aspe a été sélectionné par la région Aquitaine, dans le cadre de son Programme Régional d'Actions Innovatrices (PRAI), dédié au développement de la Société de l'Information. Lancé en 2002, il a été doté d'un budget de 200.000 euros financé par les fonds FEDER, le Conseil régional, l'Etat et la CDC (Caisse des dépôts et consignation). Cette enveloppe a permis de mettre en place une infrastructure multi-technologies utilisant le satellite, le CPL et le Wi-Fi pour parcourir les derniers mètres nécessaires au raccordement des maisons les plus isolées.
Une promesse tenue puisque depuis quatre mois, les deux villages de Etsaut et Borce, 100 habitants chacun, disposent du haut débit. Ce qui a passablement changé les comportements des autochtones, comme le rappelle Pierre-Yves Pose, président de l'Association Haute Aspe : "Tous les habitants de moins de 30 ans ont acheté un ordinateur, même ceux qui n'y touchaient pas avant. Certains voisins qui ne s'adressaient pas la parole auparavant discutent aujourd'hui par chat ou par email."
Pierre-Yves Pose qui, outre ses activités d'éleveur et de loueur d'ânes, gère un gîte d'étape équipé en Wi-Fi dans le village d'Etsaut, s'est retrouvé parachuté à la tête de l'Association Haute Aspe, la structure locale qui a mené le projet haut débit, car il avait créé lui-même son site Internet il y a plusieurs années.
Une trentaine de testeurs répartis sur les deux villages profitent actuellement gratuitement d'un débit de 1Mb/s. A l'issue de l'expérimentation, prévue pour durer 18 mois, la phase commerciale devrait prendre le relais. "Si c'était aujourd'hui, nous commercialiserions l'abonnement aux alentours de 20 euros", déclare Pierre-Yves Pose qui concède que sans aucune subvention, il serait difficile de tenir.
La baisse des tarifs n'est d'ailleurs pas à l'ordre du jour. Plusieurs éléments freinent encore le déploiement du CPL à l'échelle industrielle. Car si ses performances techniques ont été validées par plusieurs expérimentations, EDF R&D reconnaît sur son site Web le besoin de faire passer les débits crêtes à 100 Mb/s. Par ailleurs, le cadre réglementaire ne facilite pas les choses : pour qu'EDF puisse faire transiter des données sur son réseau électrique, il faudrait qu'il abandonne son principe de spécialité et qu'il obtienne une licence d'opérateur. Sa filiale EDEV CPL Technologie, dédiée au CPL et créée en mai 2003, ne souhaite d'ailleurs pas s'exprimer sur le sujet, par crainte de "donner l'impression d'être potentiellement opérateur". Car ce statut l'amènerait, de fait, à court-circuiter France Télécom sur la boucle locale.
A cela vient s'ajouter trois autre contraintes majeures : l'absence de normalisation sur les équipements outdoor (alors que la norme HomePlug existe pour l'indoor), le prix de revient des équipements, et le calcul difficile de la rentabilité comparée à celle de l'ADSL. "EDF n'est pas certain de la rentabilité du CPL, car il n'a pas de visibilité sur le marché, explique Stéphane Lelux, directeur du cabinet de conseil Tactis. Or, le marché ne pourra démarrer que si les FAI commencent à communiquer, ce qui n'est possible que si EDF se décide à équiper ses réseaux. En effet, il n'y a pas de dégroupage sur le réseau électrique. EDF a le monopole tant qu'il possède la concession des communes."
Certains signes vont néanmoins dans le sens d'un déploiement progressif du CPL : le gouvernement, par le biais du CIADT du 3 septembre 2003, a exprimé sa volonté d'expertiser la possibilité de recourir au CPL pour relier des zones non desservies par un service d'accès à l'Internet haut débit. Par ailleurs, une quarantaine d'équipementiers au niveau mondial sont dans les starting blocks. Parmi eux, Schneider Electric Powerline Communications, présent en France, Alterlane (dont EDF possède une partie du capital), ou encore Mainnet. Enfin, le CPL représente un relais potentiel de croissance pour les acteurs de l'électricité, dans un marché libéralisé.
Le
haut débit par satellite en orbite sur la france
Aramiska arrose
l'Europe avec l'Internet par satellite. Les PME peuvent désormais se connecter
au haut débit quel que soit leur localisation géographique. (Lundi
8 juillet 2002)
Une parabole et un modem, c'est tout ce qu'il
faut pour goûter au confort du haut débit depuis le find fond du
Larzac. Les belles promesses du satellite ont donc mis deux ans à parvenir
jusqu'aux clients finaux, mais elles sont arrivées à bon port :
"la technologie est au point depuis plusieurs années, mais elle est
longtemps demeurée beaucoup trop chère pour être rentable"
explique Philippe Bodart, PDG d'Aramiska. Les choses ont changé : la société
Hollandaise propose depuis peu une offre opérationnelle en France, en Angleterre,
en Irlande, en Espagne, en Allemagne, en Italie et au Benelux.
Concurrent
de l'ADSL ?
On peut donc désormais se connecter à Internet
par satellite - aussi bien pour recevoir des données que pour en émettre
: inutile d'ouvrir une ligne téléhonique pour envoyer ses paquets
de données vers l'Internet. Les débits oscillent entre 256 Kbit/s
et 2 Mbit/s en réception, et entre 64 et 384 Kbit/s en émission.
De quoi entrer sans complexe dans
la famille des accès à haut
débit. Les tarifs sont compris entre 200 et 550 euros par mois, ce qui
met les prix du satellite sur orbite, à une certaine distance des tarifs
de l'ADSL - qui ont semble-t-il gardé les pieds sur terre. On trouve en
effet des accès ADSL pour moins de 60 euros par mois. Mais la comparaison
ne fait pas peur à Philippe Bodart : "le satellite est disponible
partout, notamment là où l'ADSL ne l'est pas".
Mais Aramiska ne mise pas tout sur les zones non couvertes par l'ADSL : "Nous allons évidemment concentrer nos efforts commerciaux sur le sud de la France, là où le maillage ADSL est plus distendu et où les PME abondent. Mais nous comptons aussi séduire d'autres clients, gràce à notre offre tout-intégré de gestion des systèmes d'information". Aramiska s'adresse en effet aux PME et aux professions libérales, qui n'ont pas toujours un responsable informatique compétent sous la main : "Ces entreprises de 15 à 25 employés sont demandeuses de services, comme le backup, le DNS, les serveurs de mail, le VPN, etc ... Nous nous occupons de l'intégralité de leur système d'information".
Un marché naissant
Le marché de l'accès satellitaire en est à ses premières
heures : "nous sommes seuls à proposer une véritable offre,
avec un prix fixe, une date d'installation précise, un installeur, une
facture, et un site Internet pour passer commande" indique Philippe Bodart.
L'offre d'Aramiska a été lancée en Angleterre en Avril, et
l'entreprise compte actuellement quelque 400 clients. D'ici 2004, Aramiska souhaite
en convaincre plus de 20 000 : "nous avons loué la capacité
de 3 transpondeurs sur le satellite Eutelsat, et chaque transpondeur peut gérer
le traffic de 15 à 20 000 clients".
2004 sera également
l'année de l'équilibre pour Aramiska, si toutefois le succès
est au rendez-vous : "Notre investissement est beaucoup moins lourd que celui
des fournisseurs d'accès ADSL : 50 millions d'euros nous suffisent, alors
qu'une infrastructure ADSL coûte facilement
200 millions. Les cycles
de rentabilité sont eux-aussi beaucoup plus avantageux".
Aramiska
compte réaliser 3 millions de chiffre d'affaires cette année, et
monter rapidement en puissance : l'entreprise emploie déjà une centaine
de personnes et doit justifier rapidement les 50 millions d'euros investis par
Whitney & co. Le pari est peut-être un peu risqué eu égard
à l'atonie du secteur des télécommunications, mais la technologie
a le mérite d'être originale.
par Nicolas Six, JDNet.